Publication trimestrielle du Laboratoire
d'analyse et d'architecture des systèmes du CNRS
© Patrick Dumas/Look at science
L’objectif du projet Adream est de préparer la synergie de tous ces domaines, d’anticiper les outils nécessaires à leur conception et de proposer les premières expérimentations s’y rapportant. Ces recherches vont ainsi renforcer les compétences du LAAS et de ses partenaires sur les capteurs, les mesures, les systèmes de communication, la protection de la vie privée, les robots rendant de multiples services en interaction avec les humains, les systèmes énergétiques, et sur tous les nouveaux systèmes soumis à de fortes contraintes de performance, d’énergie, de résilience ou de sécurité.
Adream comporte un programme scientifique soutenu par un ensemble de plateformes et conforté par un bâtiment expérimental instrumenté. Le fort besoin de disposer d’un site expérimental adéquat, c’est-à-dire qui soit complexe pour être un démonstrateur significatif tout en restant maîtrisable, a conduit à la construction d’un nouveau bâtiment, conçu pour être lui-même le support des expérimentations. Ce contexte expérimental préfigure un domaine d’application extrêmement important économiquement et socialement. Il devrait ainsi nous permettre, avec nos partenaires, de proposer, déployer et valider, par les utilisateurs occupant ce bâtiment, ce que pourrait être notre proche environnement de travail et par extension de vie dans les dix prochaines années.
"Le fort besoin de disposer d’un site expérimental adéquat a conduit à la construction d’un nouveau bâtiment, conçu pour être lui-même le support des expérimentations."
La recherche, pour la conception interdisciplinaire de systèmes complexes autonomes
La vocation d’Adream étant de développer les recherches, de préparer les outils, et de définir les premières expérimentations, le projet doit, avec des collaborations, proposer, dans ces champs scientifiques et technologiques, de nouveaux développements et intégrations interdisciplinaires innovants. Il doit aussi pouvoir déployer et valider les résultats obtenus sur des systèmes réels complexes, mais complètement observables et commandables. Il s’agit de concevoir des hiérarchies de multiples réseaux de capteurs, d’actionneurs et de robots, mobiles et coopératifs, allant des microsystèmes embarqués aux systèmes complets. Ce type de systèmes a été nommé aux Etats-Unis « systèmes cyberphysiques », qui associent le monde virtuel de l’informatique au monde réel de la physique. Tous les composants et sous-systèmes de tels Systèmes Cyberphysiques devront être d’un fonctionnement sûr vis-à-vis des fautes accidentelles et des malveillances, inter-opérables, et capables d’adaptation dans un large spectre de tâches et de fonctions, et devront, autant que possible, être autonomes sur les plans énergétique, fonctionnel, et décisionnel.
Les plateformes, supports de la conception et d’évaluation
Le deuxième objectif est d'étendre les trois plateformes ouvertes, la plateforme de conception, celle de caractérisation de micro-nanosystèmes et celle de robotique déjà existantes au LAAS, et d'en créer deux nouvelles dans le bâtiment Adream, indispensables à la réalisation de ces systèmes : une plateforme de systèmes embarqués et une de production et gestion d'énergie.
Un bâtiment pour le déploiement et l’évaluation
Ce nouveau bâtiment, le troisième objectif du projet, intègrera des travaux multi-disciplinaires en électronique, énergie, informatique, et commande. Sa construction, unique en son genre, a été achevée et il est occupé par des chercheurs et techniciens depuis mars 2012. Il offrira un niveau de coopération multi-disciplinaire encore jamais atteint. Les architectures et solutions classiques des systèmes disciplinaires devront être étendues afin de permettre une conception unifiée de ce système de systèmes, creuset de nouvelles approches innovantes intrégratrices.
Du point de vue électronique et énergétique, le bâtiment comporte un mur façade et deux toits entièrement équipés en panneaux photovoltaïques pour la production d’énergie et la recherche s’y rapportant, combinés à trois pompes à chaleur géothermiques et à un puits canadien, pour l’étude et l’optimisation de systèmes innovants de conversion et d’optimisation d’énergie. Côté informatique et robotique, l’ensemble des équipements, des mesures, des données, des logiciels et des actions sera enrichi par les actions de robots autonomes et les interconnexions de réseaux à qualité de service garantie. Cet ensemble de solutions et services sera alors soumis à la satisfaction des besoins des occupants.
© Jean-Benoît Meybeck pour le LAAS-CNRS
La genèse et la vision scientifique
La définition du projet a nécessité un long travail qui a débuté en 2006 afin de répondre à la nécessité d’interdisciplinarité, fortement encouragée par les directeurs successifs du LAAS, Malik Ghallab, Raja Chatila et Jean-Louis Sanchez. Partant d’une base scientifique de conception autour de réseaux tout IP, l’idée était de préfigurer la nouvelle génération des systèmes embarqués, c’est-à-dire en les dotant de comportements autonomes et en les intégrant dans une coopération distribuée reposant sur le modèle de l’Internet. La problématique devient plus générale et complexe mais constitue une avancée qui Ces propositions, débattues avec l’ensemble du laboratoire, ont fait l’objet d’une présentation et d’un appel à idées en 2009 à l’initiative de Raja Chatila. Parmi les propositions, une recherche sur la génération, la conversion et le stockage de l’énergie photovoltaïque, portant sur la problématique du développement durable, s’insérait parfaitement dans le contexte de Adream et augmentait sensiblement la portée des recherches et des résultats attendus. Cette problématique de gestion et d’optimisation énergétiques a alors été intégrée au projet et au bâtiment expérimental déjà défini. Conforté par les directeurs suivants, Jean-Louis Sanchez et Jean Arlat, il est indéniable que l’ensemble des thèmes de recherche et de développement ainsi constitué, associant informatique, automatique et électronique, dans les domaines de la perception, de la communication, de la robotique, de la sûreté de fonctionnement, de l’énergie et de la commande, conduira au développement de travaux permettant d’anticiper et d’évaluer de nombreuses applications de notre environnement de vie dans les dix prochaines années.
Adream a été défini et proposé en 2006 dans une intention prospective. Une des conséquences de l’évolution technologique était déjà le développement de l’Internet, en tant que réseau de réseaux, acceptant les nouvelles technologies et les nouveaux services ; système d’accessibilité, en permettant des communications entre de plus en plus d’utilisateurs. Pour les réseaux, de nouvelles architectures sont proposées. Elles reposent sur des paradigmes novateurs, comme les interactions directes pair-àpair, l’utilisation de la localisation réelle, et l’optimisation des relations entre données et utilisateurs. Conjointement, avec la mobilité, ils commencent à conduire à de nouveaux concepts et protocoles prometteurs, comme les réseaux tolérant les délais et les réseaux ad-hoc. De même, les processeurs embarqués commencent à être intégrés dans tous les objets et les environnements. Les capteurs deviennent smarts, en intégrant des traitements et la communication. Les premiers réseaux de capteurs et d’actionneurs qui en résultent connaissent un énorme développement. Tout semble ainsi pouvoir être connecté, et les premiers travaux apparaissent sur l’Internet des objets, avec un premier rapport publié par l’ITU fin 2005. Il devient possible de connaitre un état distribué, de l’interpréter et d’en déduire des décisions et actions, alors applicables à distance.
© Nicolas Schmitt pour CNRS et Garrigues SA
La robotique tire aussi profit de ces avancées. Ainsi, les perceptions, les communications et les commandes des robots peuvent être fortement étendues. Par exemple, les possibilités de cartographie et de localisation simultanée sont susceptibles d’être menées en temps réel, et les connaissances des robots augmentées par de nouveaux capteurs. De plus, ceux-ci conduisent à une interaction bien plus riche entre les robots et avec leurs environnements dans une intention prospective. Une des conséquences de l’évolution technologique était déjà le développement de l’Internet, en tant que réseau de réseaux, acceptant les nouvelles technologies et les nouveaux services ; système d’accessibilité, en permettant des communications entre de plus en plus d’utilisateurs. Pour les réseaux, de nouvelles architectures sont proposées. Elles reposent sur des paradigmes novateurs, comme les interactions directes pair-à-pair, l’utilisation de la localisation réelle, et l’optimisation des relations entre données et utilisateurs. Conjointement, avec la mobilité, ils commencent à conduire à de nouveaux concepts et protocoles prometteurs, comme les réseaux tolérant les délais et les réseaux ad-hoc. De même, les processeurs embarqués commencent à être intégrés dans tous les objets et les environnements. Les capteurs deviennent smarts, en intégrant des traitements et la communication. Les premiers réseaux de capteurs et d’actionneurs qui en résultent connaissent un énorme développement. Tout semble ainsi pouvoir être connecté, et les premiers travaux apparaissent sur l’Internet des objets, avec un premier rapport publié par l’ITU fin 2005. Il devient possible de connaitre un état distribué, de l’interpréter et d’en déduire des décisions et actions, alors applicables à distance.
La robotique tire aussi profit de ces avancées. Ainsi, les perceptions, les communications et les commandes des robots peuvent être fortement étendues. Par exemple, les possibilités de cartographie et de localisation simultanée sont susceptibles d’être menées en temps réel, et les connaissances des robots augmentées par de nouveaux capteurs. De plus, ceux-ci conduisent à une interaction bien plus riche entre les robots et avec leurs environnements intelligents, qui disposent de processeurs d’état. Enfin, tous leurs contextes, dynamiques et ou complexes, sont susceptibles d’être mieux reconnus et représentés par les robots, en incluant les humains, qui peuvent être mieux perçus et peut-être compris.
Apparaissent alors les travaux sur l’enrichissement des possibilités de perception et d’action pour la robotique d’intervention et sur les interactions inter-robots à plusieurs niveaux de décision.
Il s’ensuit que l’Internet peut être le cœur potentiel de tous les systèmes complexes, et cette forte hiérarchie, largement distribuée, atteindra une complexité jamais connue auparavant. Le besoin de sûreté de fonctionnement augmente grandement pour de tels systèmes, car tout comportement incorrect sera extrêmement difficile à diagnostiquer et à corriger. De plus, les capteurs vont fournir des informations très précises sur les états, et pour les humains se pose la question de la protection de la vie privée. Des solutions permettant de prévenir de tels traçages, par exemple avec des mesures d’anonymisation, doivent être proposées.
"C’est peut-être dans les domaines de l’environnement et de l’énergie que les conséquences du développement des systèmes cyberphysiques pourraient être les plus importantes"
Au niveau des applications, les possibilités sont immenses, et ceci dans tous les domaines. La conception de ces composants et systèmes, matériels et logiciels, reposant sur des réseaux de capteurs et d'actionneurs mobiles sans fil, soulève des enjeux sociaux et économiques essentiels. C'est le cas en particulier pour des tâches de conduite, de supervision ou de diagnostic dans l'aéronautique, l'espace, les transports, et l’environnement. C'est le cas également dans les technologies médicales, avec des capteurs proches, voire portés par les humains. Par exemple, les systèmes embarqués peuvent devenir plus ou moins autonomes, et être architecturés en réseau, ayant alors la capacité de devenir globalement intelligents. C’est peut-être dans les domaines de l’environnement et de l’énergie que les conséquences du développement des systèmes cyberphysiques pourraient être les plus importantes. En effet, la présence et l’utilisation de nombreux capteurs, répartis, adaptés aux phénomènes à observer, devraient fournir les informations les plus pertinentes pour surveiller les systèmes, et donc en particulier d’éviter de dangereuses dérives et de nombreuses nuisances. De plus, toutes ces données, associées à une modélisation adéquate du problème, permettront un contrôle raisonné, par exemple une adaptation des actions appliquées aux besoins réels, ou de fournir des réactions et commandes appropriées aux vrais états des contextes environnants, et d’optimiser lorsque nécessaire le fonctionnement global du système, en maximisant ou minimisant selon les cas les impacts à maîtriser.
Soulignons qu’Adream porte un effort extrêmement important dans le domaine de la gestion de l’énergie, et que le bâtiment sera étudié comme un mini grid énergétique qui fournira de très nombreux enseignements, conceptuels et techniques, sur les solutions proposées, déployées et évaluées en son sein. Le projet est interdisciplinaire et difficile, mais la convergence entre les disciplines, qui nous a paru fondamentale, devient accessible. Prévoir l’avenir et ces systèmes, les étudier, les réaliser et surtout en évaluer leur complexité implicite et leur acceptabilité réelle nous a conduit à proposer le projet Adream.